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tout-puissant en Bretagne ; pour les paysans, c'est un prince. Le jour de son débarquement, il a eu tout de
suite huit mille hommes ; en une semaine trois cents paroisses ont été soulevées. S'il avait pu prendre un coin
de la côte, les Anglais débarquaient. Heureusement ce Gauvain s'est trouvé là, qui est son petit-neveu, drôle
d'aventure. Il est commandant républicain, et il a rembarré son grand-oncle. Et puis le bonheur a voulu que
ce Lantenac, en arrivant et en massacrant une masse de prisonniers, ait fait fusiller deux femmes, dont une
avait trois enfants qui étaient adoptés par un bataillon de Paris. Alors cela a fait un bataillon terrible. Il
s'appelle le bataillon du Bonnet-Rouge. Il n'en reste pas beaucoup de ces Parisiens-là, mais ce sont de
furieuses bayonnettes. Ils ont été incorporés dans la colonne du commandant Gauvain. Rien ne leur résiste. Ils
veulent venger les femmes et ravoir les enfants. On ne sait pas ce que le vieux en a fait, de ces petits. C'est ce
qui enrage les grenadiers de Paris. Supposez que ces enfants n'y soient pas mêlés, cette guerre-là ne serait pas
ce qu'elle est. Le vicomte est un bon et brave jeune homme. Mais le vieux est un effroyable marquis. Les
paysans appellent ça la guerre de saint Michel contre Belzébuth. Vous savez peut-être que saint Michel est
un ange du pays. Il a une montagne à lui au milieu de la mer dans la baie. Il passe pour avoir fait tomber le
démon et pour l'avoir enterré sous une autre montagne qui est près d'ici, et qu'on appelle Tombelaine.
Oui, murmura le cavalier, Tumba Beleni, la tombe de Belenus, de Belus, de Bel, de Bélial, de Belzébuth.
Je vois que vous êtes informé.
Et l'hôte se dit en aparté:
Décidément, il sait le latin, c'est un prêtre.
Puis il reprit:
Eh bien, citoyen, pour les paysans, c'est cette guerre-là qui recommence. Il va sans dire que pour eux saint
Michel, c'est le général royaliste, et Belzébuth, c'est le commandant patriote ; mais s'il y a un diable, c'est bien
Lantenac, et s'il y a un ange, c'est Gauvain. Vous ne prenez rien, citoyen?
J'ai ma gourde et un morceau de pain. Mais vous ne me dites pas ce qui se passe à Dol.
Voici. Gauvain commande la colonne d'expédition de la côte. Le but de Lantenac était d'insurger tout,
d'appuyer la Basse-Bretagne sur la Basse-Normandie, d'ouvrir la porte à Pitt, et de donner un coup d'épaule
à la grande armée vendéenne avec vingt mille Anglais et deux cent mille paysans. Gauvain a coupé court à ce
plan. Il tient la côte, et il repousse Lantenac dans l'intérieur et les Anglais dans la mer. Lantenac était ici, et il
l'en a délogé ; il lui a repris le Pont-au-Beau ; il l'a chassé d'Avranches, il l'a chassé de Villedieu, il l'a
empêché d'arriver à Granville. Il manoeuvre pour le refouler dans la forêt de Fougères, et l'y cerner. Tout
allait bien hier, Gauvain était ici avec sa colonne. Tout à coup, alerte. Le vieux, qui est habile, a fait une
pointe ; on apprend qu'il a marché sur Dol. S'il prend Dol, et s'il établit sur le Mont-Dol une batterie, car il a
du canon, voilà un point de la côte où les Anglais peuvent aborder, et tout est perdu. C'est pourquoi, comme il
n'y avait pas une minute à perdre, Gauvain, qui est un homme de tête, n'a pris conseil que de lui-même, n'a
LIVRE DEUXIEME. LES TROIS ENFANTS 129
Quatre-vingt-treize
pas demandé d'ordre et n'en a pas attendu, a sonné le boute-selle, attelé son artillerie, ramassé sa troupe, tiré
son sabre, et voilà comment, pendant que Lantenac se jette sur Dol, Gauvain se jette sur Lantenac. C'est à Dol
que ces deux fronts bretons vont se cogner. Ce sera un fier choc. Ils y sont maintenant.
Combien de temps faut-il pour aller à Dol?
A une troupe qui a des charrois, au moins trois heures ; mais ils y sont.
Le voyageur prêta l'oreille et dit:
En effet, il me semble que j'entends le canon.
L'hôte écouta.
Oui, citoyen. Et la fusillade. On déchire de la toile. Vous devriez passer la nuit ici. Il n'y a rien de bon à
attraper par là.
Je ne puis m'arrêter. Je dois continuer ma route.
Vous avez tort. Je ne connais pas vos affaires, mais le risque est grand, et, à moins qu'il ne s'agisse de ce
que vous avez de plus cher au monde...
C'est en effet de cela qu'il s'agit, répondit le cavalier.
... De quelque chose comme votre fils...
A peu près, dit le cavalier.
L'aubergiste leva la tête et se dit à part soi:
Ce citoyen me fait pourtant l'effet d'être un prêtre.
Puis, après réflexion:
Après ça, un prêtre, ça a des enfants.
Rebridez mon cheval, dit le voyageur. Combien vous dois-je?
Et il paya.
L'hôte rangea l'auge et le seau le long de son mur, et revint vers le voyageur.
Puisque vous êtes décidé à partir, écoutez mon conseil. Il est clair que vous allez à Saint-Malo. Eh bien,
n'allez pas par Dol. Il y a deux chemins, le chemin par Dol, et le chemin le long de la mer. L'un n'est guère
plus court que l'autre. Le chemin le long de la mer va par Saint-Georges de Brehaigne, Cherrueix, et
Hirel-le-Vivier. Vous laissez Dol au sud et Cancale au nord. Citoyen, au bout de la rue, vous allez trouver
l'embranchement des deux routes ; celle de Dol est à gauche, celle de Saint-Georges de Brehaigne est à [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]

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